M comme mère, M comme monstre
EAN13
9782800416779
Éditeur
Editions de l'Université de Bruxelles
Date de publication
Langue
français
Fiches UNIMARC
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M comme mère

M comme monstre

Editions de l'Université de Bruxelles

Livre numérique

  • Aide EAN13 : 9782800416779
    • Fichier EPUB, avec Marquage en filigrane
    11.99

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Tantôt furies, tantôt sorcières, les mères monstrueuses continuent-elles à
être considérées comme des êtres contre nature ou la description de ces
femmes, de leurs actes et motivations présumées, a-t-elle changé au cours les
siècles ?

De tout temps, la monstruosité des mères a suscité l’intérêt de la société.
Déclenchant les débats éthiques, des déchaînements médiatiques, elle est aussi
à l’origine d’un nombre impressionnant d’œuvres artistiques complexes.

L’infanticide maternel est un acte incompréhensible qui a toujours fasciné et
répugné à la fois... À partir de 1980, un autre regard semble s’être posé sur
ce phénomène, les auteures féminins tentant de réécrire l’histoire de Médée en
la disculpant. Cette étude de genre examine l'évolution de l'image de la mère
monstrueuse à la lumière des changements actuels des représentations féminines
et du traitement de faits d'actualité.

EXTRAIT

En effet, la perspective de l’infanticide permet de questionner plus
largement, au fil des époques, les rapports entre femme et criminalité, femme
et maternité. Les femmes ont de tout temps été minorisées par la machine
judiciaire. L’imaginaire autour de la mère monstrueuse (la tueuse d’enfants,
la meurtrière, la faiseuse d’ange ou encore la nourrice qui sombre dans la
folie comme Jeanne Weber surnommée en 1906 « l’Ogresse de la Goutte d’Or »)
contraste fort avec l’idée d’une femme qui serait par nature et par instinct
éloignée de toute forme de violence, car elle est justement celle qui est
censée donner la vie. Cette conduite criminelle spécifique liée à la nature et
au rôle féminin, évoque aussi la peur d’une féminité déréglée qui
représenterait une menace pour la sphère privée. L’attention médiatique semble
nous suggérer que de plus en plus de femmes tuent leurs enfants. Cet
engouement public ne se délecte pas seulement d’un acte très souvent désespéré
mais essaie de consolider à travers son évocation massive un équilibre des
forces politiquement genré.
Ces « affaires polarisées », comme les appelle le journaliste belge Marc
Metdepenningen, ne s’inscrivent pas simplement dans la mode actuelle des
reality shows, mais ont été utilisées depuis le début de la presse écrite en
tant que moyen pour « divertir » et influencer l’opinion du peuple. Dans son
article repris dans la première partie de ce volume, Amélie Richeux analyse
minutieusement la présentation des mères « contre-nature » dans les causes
célèbres de la France du XIXe siècle. En réécrivant des cas judiciaires à
l’attention du grand public, l’avocat Méjan influence subtilement ses lecteurs
en soulignant l’horreur des crimes et la monstruosité des accusées. Assurément
politique dans son commentaire des faits, il plaide pour la réinstauration des
valeurs de l’Ancien Régime et notamment son système des classes. Un autre
exemple de récit orienté est le recueil de Fournier qui tente dans une
perspective plus progressiste d’expliquer les faits d’une façon plus
scientifique. Durant la Belle Epoque, le journal Gil Blas est la manifestation
de cette fabrication de discours à valeur morale et politique ciblant le grand
public. Matthew Sandefer démontre parfaitement, à travers des textes
littéraires de Balzac et de Maupassant, le changement de l’image de la mère
meurtrière, qui symbolise à la fois une société en crise et la nécessité d’un
changement de la condition féminine.
Les mères indignes, ou « marâtres naturelles » pour utiliser une expression
d’Elisabeth Badinter, constituent un véritable nœud traumatique dans la
littérature francophone présentée dans la deuxième partie de cet ouvrage. La
violence et le silence dans la relation mère-fille, la loi du pouvoir et la
ténacité avec laquelle la mère insiste sur la transmission des lois
patriarcales sont des thèmes récurrents chez différentes auteures.
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