16 000 lieues à travers l'asie et l'Océanie - Tome 1
EAN13
9782914067980
Éditeur
PyréMonde
Date de publication
Langue
français
Fiches UNIMARC
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16 000 lieues à travers l'asie et l'Océanie - Tome 1

PyréMonde

Livre numérique

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Extrait


**PR ÉFACE DE LA PREMIÈRE ÉDITION.**

Je tiens a apprendre moi-meme au lecteur, avant qu'il ait tourne ma premiere
page, que ce livre n'est peut-etre pas aussi serieux que pourrait le comporter
son titre : il ne s'y trouve ni science ni decouvertes, guere d'aventures : ce
qui s'y trouve toujours, c'est la verite, ou tout au moins la bonne foi. C'est
le recit familier, fidele et personnel de ce que j'ai vu, admire ou souffert
pendant quelques annees de grands voyages en zigzags entrepris dans le seul
but de me distraire et de m'instruire. Donc, bien loin de moi la pretention
d'avoir produit un livre utile, car je n'ai jamais eu d'autre ambition que de
le rendre agreable.
Un mot maintenant au sujet de certaines susceptibilites que j'ai tres
probablement froissees. Je n'ai menage nulle part la presse coloniale d'un
pays pour lequel mon affection et mon respect sont cependant tout a fait sans
bornes. Indigne partout de son aigreur et de sa haine contre la France,
j'avoue n'avoir pas perdu une occasion d'etaler au public ses injustices et
ses indelicatesses. L'Anglais qui me lira pourrait-il s'en effaroucher ou meme
s'en etonner ? J'en serais peine, mais ne l'aurais pas merite ; car dans mes
observations les plus ameres, je n'ai jamais confondu la presse de
l'Angleterre, qui fait l'admiration autant que l'envie de tout le reste du
monde, avec celle de ses colonies : on ne peut tenir les parents pour
responsables des travers de leurs enfants, lorsqu'ils ont tout fait pour les
bien elever. Du reste, plus d'un Anglais m'a depasse sur ce chapitre.
Enfin, je me demande souvent si certaines pages reveuses, comme presque tout
voyageur doit en voir eclore machinalement sous sa plume, me seront facilement
pardonnees dans le pays qui est, par excellence, la patrie comme l'asile du
bon gout, mais ou nous voyons chaque jour et en tout la nature s'effacer
devant l'art, l'ideal devant le reel. J'ai peut-etre commis la une faute bien
grave, surtout pour les livres de voyages, qui ne vivent qu'un jour et
vieillissent plus vite meme que leurs auteurs. Alors je plaiderai, pour
m'excuser, l'influence de ces longues et narcotiques heures passees avec la
nature, de ces contemplations nocturnes, de la vie solitaire, ou l'ame devient
songeuse et s'enveloppe tristement de pavots. Rien d'etonnant que l'horizon de
mes souvenirs se depeuple, et qu'il reste vague et indefini, lorsque les
brises douloureuses de la Mongolie et de la Nouvelle-Zelande semblent siffler
encore a mon oreille.... Mes pensees doivent etre nuageuses, lorsqu'elles s'en
vont errer dans ces espaces vides, oceans, neiges ou deserts, ou j'ai passe
trop vile pour y laisser le moindre sillon, trop jeune pour que mon
imagination n'y fut point eblouie, et ne s'y dorat pas de temps en temps d'un
faible, d'un bien pale rayon de soleil.... Que la critique me soit donc
legere, ou bien que la main glacee du temps vienne au plus vite attiedir des
emotions encore trop vives : heureux si elle laisse chez moi toujours chaud et
brulant le souvenir de ceux qui m'ont servi, qu'ils soient en Europe ou a
Calcutta, sur les sables de l'Australie ou aux rives poetiques de l'Amour !


**PR ÉFACE DE LA SECONDE ÉDITION.**

Voici une seconde edition qui differe peu de son ainee. Si je n'ai meme pas
releve toutes les taches que m'ont signalees des mains excessivement
bienveillantes, c'est que j'ai craint de defigurer mon livre ou de le
travestir. Je ne me dissimule plus que c'est une oeuvre de jeunesse : mais je
n'ose en chasser le reflet qu'elle et la nature y ont jetes, et ne me repens
pas encore d'avoir plu surtout a ceux qui preferent la jeunesse avec son
delire et ses orages, aux allures plus correctes et plus raisonnables de l'age
mur.
D'ailleurs, s'il est toujours vrai que le style soit l'homme, comment exclure
tout a fait le desordre des pensees et du style du voyageur, dont l'ame
capricieuse, fondue et moulee dans la nature, ressemble a ces mers
tumultueuses qui bondissent follement sur leurs plages ? Sans fond et sans
rivage apparent, jamais calme et souvent amere, elle est du moins
transparente, et reflechit fidelement tout ce qui passe sur elle.
Voici donc mon livre tel qu'il etait, avec toute l'etrangete de ses couleurs
et de ses allures : puisqu'il a reçu un accueil que je n'esperais pas,
pourquoi vouloir y rien changer ? On doit etre trop heureux de plaire, si l'on
n'a pas le don d'etonner : et quand meme ce livre ne plairait pas longtemps,
il restera du moins a son auteur l'assurance et la consolation de savoir qu'il
aura passe sans faire de mal, et sans aigrir personne.

Janvier 1865.
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